Il y a cinquante-trois ans, le 19 décembre 1964, André Malraux prononça son plus célèbre discours en l’honneur de celui qu’il appelle le «chef du peuple de la nuit». Il participe ainsi à la construction de la légende de Jean Moulin. Tombé dans un relatif oubli après la guerre, l'unificateur de la Résistance est érigé par André Malraux en symbole du combat pour la liberté. Le choix de transférer les cendres de Jean Moulin au Panthéon est soutenu, dès 1963, par ce même André Malraux, alors ministre des Affaires culturelles, puis repris par Charles de Gaulle lui-même. L'époque est troublée, entre les déchirures de la guerre d'Algérie et les affrontements autour de la question du suffrage universel direct. La figure de Jean Moulin suscitera à ce moment-là un consensus général. Elle permettra de ressouder la cohésion nationale derrière une France résistante, unie autour du général de Gaulle. Vingt ans après sa mort en martyr, Jean Moulin connait là une canonisation laïque qui célèbre, à travers lui, la Résistance elle-même.
Francis Causse
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